Trouver, filtrer et stocker de l’eau en pleine nature
En situation de randonnée, bivouac ou survie, l’eau devient la priorité. Ce guide explique où la trouver sans se mettre en danger, comment la rendre potable (pré-filtration, ébullition, filtres, traitements chimiques, UV, SODIS) et comment la stocker correctement pour éviter la recontamination.
L’eau : priorité n°1
Sans apport d’eau, la baisse de performance et la confusion apparaissent rapidement. Comptez 2 à 3 L/jour/personne (plus par forte chaleur/effort). La règle pratique : ne partez jamais sans plan eau (sources probables, contenants, méthode de potabilisation).
Où trouver de l’eau en pleine nature
- Cours d’eau et rivières : préférez les zones amont, loin des habitations/pâturages.
- Sources et suintements : souvent plus sûrs ; captez l’eau au point d’émergence.
- Lacs/étangs : prenez l’eau au large (si possible) et sous la surface (moins de débris).
- Eau de pluie : très intéressante si collectée proprement (tarp propre, gourde large ouverture).
- Rosée : chiffon propre passé sur l’herbe au petit matin puis essoré (rendement faible).
- Compatibilité terrain : fonds de vallon, zones verdoyantes, lignes de végétation, animaux sauvages qui convergent.
Évitez les eaux stagnantes opaques, proches d’industries, d’exploitations agricoles ou en aval de zones urbaines.
Évaluer les risques avant de boire
- Microbiologiques : bactéries, virus, protozoaires (Giardia, Cryptosporidium).
- Chimiques : hydrocarbures, pesticides, métaux lourds (filtration/ébullition ne les retirent pas forcément).
- Physiques : turbidité (boue), matières organiques.
Règle d’or : si suspicion de pollution chimique, cherchez une autre source. Les méthodes de survie ci-dessous ciblent surtout le risque microbiologique.
Pré-filtrer et clarifier l’eau
Plus l’eau est claire, plus la désinfection est efficace.
- Décantation : laissez reposer 30–60 min, transvasez l’eau claire.
- Filtration grossière : tissu propre, filtre à café, bandana, chaussette microfibre.
- Charbon improvisé : couche de tissu + sable/charbon concassé (améliore goût/odeur, ne remplace pas une vraie potabilisation).
Rendre l’eau potable : méthodes
1) Ébullition (référence en terrain)
- Portez l’eau à grande ébullition (bulles vives). Maintenez 1 minute (≥ 2–3 min au-dessus de 2000 m d’altitude).
- Avantages : très fiable contre bactéries/virus/protozoaires ; simple.
- Limites : consomme du combustible ; n’élimine pas les polluants chimiques ; peut laisser un goût.
2) Filtres à eau portables
- Paille/poire/pompe/gravité : privilégiez des pores ≤ 0,2–0,1 µm (barrière protozoaires/bactéries) et/ou cartouches combinant fibre creuse + charbon actif.
- Entretien : contre-lavage régulier, éviter le gel, remplacer cartouches au besoin.
- Limites : la plupart des filtres mécaniques seuls ne neutralisent pas tous les virus ; combinez avec désinfection chimique/UV si risque viral.
3) Traitements chimiques (pastilles/liquides)
- Dioxyde de chlore (pastilles/liquide) : actif sur bactéries, virus et protozoaires (temps de contact souvent 30 min, jusqu’à 4 h pour Cryptosporidium selon notice).
- Chlore/Javel (eau de Javel non parfumée) : efficace sur la plupart des microbes ; moins sur certains protozoaires. Respectez la notice et la concentration du produit.
- Iode : solution de dépannage (virus/bactéries) mais déconseillé aux femmes enceintes, personnes avec pathologie thyroïdienne, et en usage prolongé.
Doses Javel (indication pratique, à vérifier sur l’étiquette) : pour une Javel domestique ~6 % → environ 8 gouttes/galon US (≈ 3,8 L) d’eau claire, soit ~2 gouttes/L. Pour ~8,25 % → ~6 gouttes/galon (≈ 1,5–2 gouttes/L). Doublez si l’eau est trouble après pré-filtration. Mélangez, attendez 30 min (odeur légère de chlore), puis aérez si goût fort. Utilisez uniquement une Javel sans parfum/épaississant/additifs.
4) UV portables (purificateurs à UV-C)
- Désactivent bactéries/virus/protozoaires en peu de temps (suivez la durée par volume indiquée par l’appareil).
- Exigent une eau claire. Piles/batterie nécessaires.
5) SODIS (désinfection solaire)
- Remplir des bouteilles PET transparentes ≤ 2 L d’eau claire (pré-filtrée, faible turbidité).
- Exposer à plat, plein soleil pendant ≥ 6 h (ou 2 jours si ciel voilé). La combinaison UV A + chaleur améliore l’inactivation microbienne.
- Solution d’appoint sans combustible ; moins adaptée si eau trouble ou climat froid.
6) Combinaisons recommandées
- Filtre (fibre creuse) + charbon actif → puis chlore/dioxyde de chlore si risque viral.
- Pré-filtration + ébullition quand le combustible n’est pas limitant.
Comparatif express
| Méthode | Efficacité microbienne | Points forts | Limites |
|---|---|---|---|
| Ébullition | +++ (bactéries/virus/protozoaires) | Fiable, simple | Combustible, pas d’action chimique |
| Filtre 0,1–0,2 µm | ++ (bactéries/protozoaires) | Rapide, améliore goût | Virus souvent non retenus |
| Dioxyde de chlore | +++ | Efficace y compris virus | Temps de contact, coût |
| Javel (chlore) | ++ (virus/bactéries) | Économique, disponible | Goût/odeur, protozoaires résistants |
| UV-C | +++ (si eau claire) | Rapide, sans goût | Batterie, eau claire requise |
| SODIS | + à ++ | Gratuit, sans combustible | Lent, soleil nécessaire |
Stocker et transporter l’eau
- Contenants : gourdes rigides, poches souples (1–3 L), bouteilles PET (léger), bidons HDPE.
- Hygiène : rincez avec eau traitée ; évitez de toucher l’intérieur/les bouchons ; séparez sale vs potable.
- Recontamination : remplissez après traitement ; buvez directement sans transvaser inutilement.
- Marquage : identifiez les contenants « brut » vs « potable » ; datez si stockage prolongé.
- Quantités : visez 2–3 L/personne/jour (plus si canicule/effort) + marge cuisine.
Cas particuliers
- Neige/glace : faites fondre (au besoin avec un peu d’eau au fond de la popote), puis portez à ébullition. Ne mangez pas la neige (hypothermie).
- Eau salée : non potable sans dessalement (distillation, osmose). Les méthodes ci-dessus ne retirent pas le sel.
- Pollution chimique : changez de source. Ni ébullition ni traitement standard n’éliminent fiablement tous les polluants.
FAQ
Combien de temps faut-il faire bouillir l’eau ?
Amenez l’eau à forte ébullition pendant 1 minute (et 2–3 minutes au-dessus de 2000 m).
La Javel rend-elle l’eau toujours potable ?
Elle est efficace sur beaucoup de bactéries et virus mais moins sur certains protozoaires. Pré-filtrez une eau claire, respectez la concentration/dose, ou combinez avec filtration/UV. N’utilisez que de la Javel non parfumée sans additifs épaississants.
Un filtre à paille suffit-il ?
Pour des eaux de surface peu suspectes, oui pour bactéries/protozoaires. En cas de risque viral (forte fréquentation humaine/animale), ajoutez un traitement chimique ou UV.
Comment améliorer le goût de l’eau traitée ?
Charbon actif (cartouche), aération (secouez le récipient), une pincée d’électrolytes après traitement.
Conclusion & check-list
En nature, partez sur le triptyque : contenants adaptés, pré-filtration systématique, méthode de potabilisation fiable (ébullition, filtre + désinfection, UV). Évaluez le contexte (microbiologique vs chimique) et privilégiez toujours la source la plus sûre.
- 1 gourde rigide + 1 poche souple (≥ 3 L au total)
- Filtre fibre creuse + charbon actif
- Pastilles dioxyde de chlore / Javel non parfumée (secours)
- Popote + réchaud (ébullition)
- Préfiltre tissu + sacs de collecte


